Se retrouver à faire l’amour devant un photographe, inconnu une heure auparavant, pour une séance photo à deux : le plus surpris des trois a sûrement été le photographe. La séance était prévue pour de l’érotisme, pas clairement pour de la photo intime même si c’était mon arrière-pensée. C’était sans compter sur la libido de mon partenaire, un brin provocateur, ce qui arrange tout. Le photographe n’était clairement pas à mon goût (bien au contraire !), ce qui aurait pu faciliter la détente utile à ce genre d’exercices. Je l’ai tout simplement oublié, ne le regardant pas, et il a su également se faire discret, visiblement très content qu’on lui offre cette expérience. Enfin ça, on l’a su quand il nous a remercié à la fin de la séance.
La première fois que j’ai osé, il faut dire que les circonstances s’y prêtaient fortement. Une plage de sable blanc, quelques palmiers et un ciel bleu azur, sur les Iles Exumas. C’était en 2013 au cours d’un voyage aux Bahamas avec une amie de 20 ans, Carole, navigatrice, qui connaissait cet endroit dénué d’âmes qui vivent. J’avais mon Canon et je lui ai proposé une séance photo « à poils ». Bien que je ne l’aie jamais vu complètement nue, j’ai été à l’aise de la photographier alors qu’elle prenait des pauses sensuelles avec une aisance que j’admirais alors. Les photos étaient à mon goût. Quant à moi, je ne savais pas poser, et j’avais plutôt envie de faire le singe que de me prendre au sérieux, mal à l’aise avec ce corps nu qui m’appartenait. On a dû s’y prendre à deux fois, pour que j’arrête de jouer au clown. Je me souviens d’avoir recouvert mon corps mouillé de sable fin pour ne pas me sentir nue et pouvoir adopter des poses plus sensuelles. Je n’avais alors pas encore goûté aux filles, c’était plutôt troublant…
Je me suis toujours dit qu’un jour je ferais des photos érotiques. Enfin pas celles que je fais en selfie ou devant la glace de ma salle de bains. Non, des photos avec un vrai photographe qui me dirait comment redresser mes épaules, mes hanches ou ma jambe droite. Alors, la vie m’a mise sur le chemin de Laurent, rencontré à une soirée Happysex et recroisé à un « Atelier câlin » quelques mois plus tard. Encore une histoire à rallonge, qui englobe cette séance photo intime dont j’attendais beaucoup. J’avais prévu des tenues plus ou moins sexys, de jolies chaussures. Oui, en fait, je n’étais pas à l’aise pour me mettre totalement nue encore. C’était en 2015, dans un appartement sous comble à Paris loué pour l’occasion, où la lumière de novembre est tombée trop vite, à moins que ce ne soient nos bavardages qui aient été trop longs… Pas vraiment dirigée, j’ai fait ce que je pouvais avec mon corps, ne voyant pas le rendu. Bien qu’aujourd’hui je n’utilise plus aucune de ces photos, elles ont été pour moi un début de preuve de quelque chose de possible.
Le vrai déclencheur se passe six mois plus tard dans un studio photo, avec un professionnel, qui avait des idées bien précises sur ce qu’il voulait. J’avais vu certaines de ses photos sur un profil de site libertin et je l’ai contacté pour lui demander ses services. J’ai prêté mon corps dans un échange séance contre photos. J’adore le troc. Circonstances un peu particulières : je suis arrivée en retard, en ayant dormi à peine deux heures, et encore probablement imbibée de la vodka ingérée la veille, ce qui est d’autant plus rare que ce n’était vraiment pas approprié. Je n’ai rien dit de mon état plutôt embrumé, et nous avons débuté une séance dirigée, devant un grand écran sur lequel les photos apparaissaient au fur et à mesure. Outil fort intéressant, qui me permettait de corriger ma posture en fonction de mon regard. J’ai adoré voir le rendu en live, me demander si l’image correspondait bien à ma personne, à ne pratiquement pas me reconnaître. Comme si une nouvelle moi était née, doucement, la femme pudique et réservée laissant place à une expression corporelle qui me plaisait beaucoup.
Quand quelques mois plus tard Aurore, une « amie » que j’avais abordée sur Facebook à mes débuts de conquête féminine, me propose une séance photo intime, je n’hésite pas. J’y ai pris goût car à chaque fois, je sens une différence dans l’approche qui me permet d’aller encore plus loin. Et là, plus besoin d’être dirigée, je prends de moi-même des formes improbables dont le rendu me paraît encore plus enthousiasmant. Il faut dire que la séance précédente m’a apprise que les photos avec de belles cambrures n’étaient pas très naturelles, et qu’il fallait souffrir un tantinet pour en arriver à ce résultat. Mais bon, pour ce sujet, ce qui compte c’est le résultat justement. Je remarque aussi qu’entre les deux séances, j’ai un nouveau tatouage. Il m’habille le flanc gauche, du haut de la fesse jusqu’à l’épaule et participe grandement au fait d’être aujourd’hui fière de mon corps. Et finalement pas si nue que ça.
Il en aura fallu des expériences devant l’objectif pour en arriver à ce point culminant de séance photo intime.